Toujours pas de nouveau gouvernement

Toujours pas de nouveau gouvernement en Islande depuis les élections législatives du 29 octobre dernier.

]Le chef du parti de l’Indépendance, Bjarni Benediktsson, avait reçu un mandat du président pour former un nouveau gouvernement. Finalement il semble qu’il ne pourra pas former une coalition capable de gouverner (la réforme des quotas de pêche est un point bloquant pour les 2 autres partis pressentis pour former la coalition) .
Bjarni Benediktsson devrait donc renoncer et rendre le mandat au président. C’est maintenant Katrín Jakobsdóttir, leader de la gauche verte, qui parait la mieux placée pour former un nouveau gouvernement. Mais elle aussi devra s’allier avec plusieurs partis pour gouverner, dont les Pirates, et les discussions pourraient à nouveau être difficiles…

Talar þú íslensku? 16 novembre, journée de la langue islandaise

Talar þú íslensku?

Aujourd’hui, c’est la journée de la langue islandaise.
Cette date a été choisie car c’est le jour de naissance de l’un des plus grands poètes islandais, Jónas Hallgrímsson (né le 16 novembre 1807).
La culture et l’histoire islandaises sont intimement liées à la langue. L’islandais est la langue officielle et nationale, l’Islande étant un cas unique, composé qu’il est de différentes régions qui n’ont pas leur patois. L’islandais se rattache à la branche nordique des langues germaniques au sein de la famille des langues indo-européennes, et comme toutes les langues germaniques, offre de nombreuses et riches possibilités de combinaisons. Il a le plus de parenté avec le féroïen et quelques dialectes de l’ouest de la Norvège, il est plus éloigné du danois et du suédois. Des cousins lointains, si l’on peut dire, sont l’anglais, le néerlandais et l’allemand. C’est une langue qui offre à l’étranger de grandes difficultés phonétiques et grammaticales, en raison de la complexité des conjugaisons et déclinaisons d’une part, et d’un système d’adverbes très élaboré.

D’autre part, bien que l’islandais utilise les lettres de l’alphabet latin, il comporte plusieurs caractères et accents spécifiques, ð, þ, æ, alors que les lettres c, q, w et z n’y existent pas.
Les Islandais aiment leur langue et la défendent contre l’invasion de mots étrangers : les néologismes internationaux et le vocabulaire technique y sont intégrés en les adaptant. Des exemples : le mot pour téléphone : sími (fil qui parle), pour logiciel : hugbúnaður (littéralement équipement pour penser), vegabréf (passeport – feuille de route), myndsendir (télécopieur – émetteur d’images). Les Islandais n’ont aucune difficulté à lire et comprendre un texte islandais ancien, seule la prononciation a évolué. Rares sont les mots provenant de l’étranger, citons banani, kaffi, tóbak. Les Français seront amusés d’apprendre que le mot mella (femme légère) provient de l’abréviation « mademoiselle », des lettres envoyées d’Islande par les pêcheurs français à leur belle…

Les noms se déclinent également, et conformément à l’usage patronymique islandais qui est fondé sur l’attribution du patronyme par le prénom de l’un des parents suivi de « fils de » ou « fille de » : Anna Gísladóttir étant la fille de Gísli, Gísli Helgason lui-même étant le fils de Helgi, etc., et puisque nous évoquions le téléphone, l’annuaire téléphonique se singularise par l’énumération alphabétique des abonnés par prénom, ce qui donne une multitude d’abonnés d’un même nom.

Actualités islandaises – Octobre 2016 (par Michel Sallé)

… voici ce que retient Le Monde (http://www.lemonde.fr/europe/articl…) des élections législatives du 29 octobre ! « Percée espérée » par qui ? Par les 14.5% des votants qui se sont prononcés en faveur du Parti Pirate ? par les journalistes étrangers (40 journalistes étrangers présents à cette occasion) ? Dans leurs articles les reproches pleuvent sur ces pauvres électeurs islandais dont 88.4% des inscrits, soit ont voté pour d’autres partis, soit ne se sont pas déplacés, manquant ainsi l’occasion de s’illustrer comme un laboratoire pour la démocratie européenne. Pire : 30% des votants aveuglés par la progression de leur pouvoir d’achat (10% en un an) et l’absence de chômage auraient fait confiance une fois de plus à des politiciens réactionnaires et corrompus ! Or ce scrutin est porteur d’autres enseignements intéressants, peut-être plus importants pour l’avenir que l’émergence des Pirates.
Et tout d’abord l’abstention : 79.2% des inscrits seulement ont voté. Il faut remonter à 1933 pour trouver un score inférieur à 80% pour des élection législatives ; encore s’agissait-il de circonstances exceptionnelles : la crise des années 30 qui a touché l’Islande plus encore que beaucoup de pays. Cette tendance inquiète d’autant plus qu’elle s’inscrit dans la durée (83.6% en 2007, 85.1% en 2009, 81.5% en 2013) et concerne aussi les autres consultations. Il faudra approfondir les causes de désaffection progressive, qui semble concerner surtout les jeunes.
On voit sur ce tableau que d’autres partis que les Pirates n’ont pas atteint les objectifs « espérés » :
– l’Alliance Social-démocrate qui avec 5.7% des suffrages ne conserve que 3 des 9 députés élus en 2013, après en avoir eu 20 en 2009. Manifestement traumatisée par sa défaite de 2013, l’Alliance ne semble pas, malgré un changement peut-être trop tardif de président, avoir trouvé les ressources pour réagir. Oddný Harðardóttir en tire les conséquences en démissionnant. Sous des formes diverses, l’Alliance représente un mouvement présent dans toute l’histoire politique de l’île ; qui la remplacera si elle ne parvient pas à se relancer ?
– le Parti du Progrès est le parti le plus ancien d’Islande, né en 1916 comme parti agrarien. Avec 11.5% des votants il aura 8 élus, soit 11 de moins qu’en 2013 (24.4% des voix). Il est vrai que 2013 avait été une année exceptionnelle reposant sur une promesse démagogique de Sigmundur Davíð Gunnlaugsson son président. Et c’est aussi à lui, en partie, que le Parti du Progrès doit son échec, pour avoir été cité dans les Panama papers et menti à ce propos (voir chroniques de mars 2016), et avoir refusé de quitter volontairement la présidence du parti. Le départ obligé de son président (voir chronique de septembre 2016) a profondément divisé le parti et n’a pas généré le sursaut que ses dirigeants attendaient. La clientèle agrarienne a fondu ; Sigmundur Davíð avait cru possible d’y pourvoir par un discours nationaliste et populiste. Sigurður Ingi Jóhannsson, nouveau président, est plus dans la tradition. Saura-t-il trouver une nouvelle voie ?
Vient ensuite un miraculé « Avenir Radieux » dont j’ai annoncé ici à plusieurs reprises la disparition, très sceptique sur la capacité de son nouveau président Óttar Proppé à la sortir de sa crise. Avec 7.2% des voix et 4 sièges (-2), il étonne, certainement parce qu’il a su présenter des candidats, et surtout des candidates, extrêmement pugnaces. Dans un Alþingi très parcellisé il peut jouer un rôle d’appoint à une majorité qu’il va être difficile de former.
Avec 10.5% des voix et 7 sièges, le nouveau né « Redressement » peut se déclarer satisfait, même si les sondages lui ont souvent prédit un meilleur score. Ses sept députés sont des personnalités expérimentées issues du Parti de l’Indépendance ou d’organisations professionnelles. Il pèsera dans l’Alþingi, au pouvoir ou dans l’opposition.
Les deux vainqueurs sont la Gauche Verte et surtout le Parti de l’Indépendance.
– la première (15.9% des voix et 10 sièges – +3) doit son succès à sa présidente Katrín Jakobsdóttir, à une popularité dans l’opinion qui dépasse largement son parti, et à sa capacité à calmer les voix discordantes entendues pendant tout le temps du gouvernement de gauche,
– le second est incontestablement le vainqueur (29% des voix et 21 sièges – +1). Il a su résister à quatre ans de gouvernement avec un Parti du Progrès très rapidement en chute dans les sondages, à la scission de personnalités amies( ?) pour fonder Redressement, et aussi à l’apparition de Bjarni Benediktsson et Olöf Nordal (Président et Vice Président du parti) dans les « Panama Papers ». Il a été porté par l’excellence de la conjoncture économique (Bjarni est aussi ministre des Finances) ainsi que par la multiplicité des partis candidats. Jamais le nombre d’indécis à quelques heures du scrutin n’avait été aussi élevé, et dans le doute un Islandais choisira le Parti de l’Indépendance, presque toujours au pouvoir depuis un siècle. Pourtant il est loin des 35 à 40% du siècle dernier ou même des 36.6% et 25 sièges obtenus en 2007 !
Et le Parti Pirate, vainqueur ou vaincu ? En tout cas déçu car il était crédité de 20% peu de temps avant le scrutin, et de 35 à 40% en janvier 2016, et que ses dirigeants se voyaient déjà au pouvoir ; mais vainqueur pour avoir maintenant, avec 14.5% des voix, 10 députés soit 7 de plus qu’en 2013. Plusieurs explications peuvent être données à l’absence de la « percée espérée » :
– l’embarras trop visible de ses dirigeants et leurs désaccords publiques lorsqu’en mars 2015 le parti a sauté de 15 à 35% d’intentions de vote (voir chronique de mars 2015),
– le non respect répété par Birgitta Jónsdóttir elle-même de la démocratie interne au parti, dont la véritable cheville ouvrière, Helgi Hrafn Gunnarsson, a fini par s’écarter, peut-être temporairement,
– formalisation d’un véritable programme de gouvernement ne laissant guère de place à la « démocratie directe » et ressemblant à s’y méprendre à celui des autres partis d’opposition, ce qui revenait à renoncer à sa spécificité,
– des listes de candidats peu connus ou peu considérés…
J’ai écrit ici plusieurs fois que le Parti Pirates n’avait pas été initialement conçu comme un parti de gouvernement mais comme un parti « poil à gratter ». En lui refusant l’accès au pouvoir les électeurs lui ont donné le temps de s’organiser et d’approfondir certaines de leurs idées, et y intéresser ces derniers.
Le nouvel Alþingi
63 députés dont 30 femmes,
– 27 nouveaux députés
– le plus âgé aura 68 ans
– les 3 plus jeunes (3 femmes) sont nées en 1990
– une session de formation est organisée à l’intention des nouveaux.
On attend maintenant avec curiosité et impatience de connaître la forme de la nouvelle majorité ; à moins que ce ne soit un gouvernement minoritaire ?
Actualité économique
Le développement du tourisme
Les mises en garde se suivent et se ressemblent, venues d’Islande ou d’ailleurs : le développement échevelé du tourisme (le nombre de nuitées d’étrangers dans les hôtels a augmenté de 38% en septembre 2016 par rapport à septembre 2015) est dangereux. Ainsi le Financial Times du 8 octobre (pour les abonnés voir : « Iceland tourism boom stirs dark memories ») trouve que l’Islande de 2016 ressemble beaucoup à celle de 2007 ; il cite Þorvaldur Gylfason, professeur d’économie à l’Université : « nous n’avons pas réussi à appendre la leçon » ou encore Ásta Guðrún Helgadóttir, députée (réélue !) du Parti Pirate, qui insiste sur les investissements nécessaires pour que les touristes soient reçus dans de bonnes conditions notamment le réseau routier. Il est vrai que les accidents sont nombreux notamment à l’approche de l’hiver. Où les autorités réalisent que le pays n’est pas équipé pour faire face à des accidents graves, impliquant par exemple un autocar.
Toujours dans le même article de FT, Bjarni Benediktsson, Président du Parti de l’Indépendance et alors Ministre des Finances, se montre satisfait de cette diversification de l’économie. Pour lui comme pour beaucoup de ses compatriotes la seule question est comment tirer le plus de profit de cette opportunité. Mais comme conclut très bien le journaliste de FT une éruption volcanique pourrait gêner les transports, ou une secousse sismique !
A plus long terme c’est l’écologie de l’île qui est en question, et la langue qui y est parlée et s’anglicise à grande vitesse, soit l’identité des Islandais. Il est vrai que cette identité inclut la capacité à saisir toutes les opportunités pour entreprendre !
La progression de la couronne
A 124.2 Ikr pour 1 euro (27 octobre) la couronne islandaise est revenue à son niveau de l’été 2008, après être passée non loin de 200 Ikr pour 1 euro. Elle a progressé de 14% en un an. Les effets sont positifs pour le niveau des prix à la consommation, puisque les produits importés, y compris les produits pétroliers, ont un effet déflationniste. Le principal facteur d’inflation est le logement, conséquence directe du boom touristique.
Mais, comme je l’ai souvent relevé ici, cette bonne santé de la couronne a des effets négatifs sur l’exportation des produits industriels et de la pêche. Pour ces derniers la situation est compliquée par la chute de la livre sterling après le Brexit. Selon Heiðrún Lind Marteinsdóttir, Secrétaire Générale de l’Association des entreprises de la pêche : « en 2015 nous avons exporté pour 48.5 milliards d’Ikr vers la Grande Bretagne, notre estimation pour 2016 est 9 à 10 milliards de moins. »
L’exportation de services autres que le tourisme (ingénierie et conseil, logiciels, data centers…) que l’Islande souhaite développer est elle aussi handicapée, à la fois par l’évolution de l’Ikr et par les hausses de salaire consenties au printemps 2015.
Actualité sociale
L’égalité des rémunérations femmes/hommes
Le 24 octobre à 14h38, un grand nombre de femmes arrêtent leur travail, et celles qui le peuvent se rassemblent devant l’Alþingi. 24 octobre ? parce que le 24 octobre 1975 l’égalité des salaires leur a été promise… 14h38 ? parce que avec une rémunération inférieure de 29.7% en moyenne à celle des hommes le travail effectué au-delà de 14h38 ne leur est pas payé. On peut voir sur la photo ci-contre qu’elles ont gagné 30 minutes en 11 ans ; le problème devrait donc être réglé en 2068 !
L’immigration
Selon Hagstofa (Bureau des statistiques) il y avait en Islande au 1er janvier 2016 31812 immigrés (entendus comme personnes nées à l’étranger de parents étrangers. Voir http://www.statice.is/publications/…) soit 9.6% de la population, à comparer à 8.2% au 1er janvier 2015. La deuxième génération (personnes nées en Islande de parents immigrés) a elle aussi progressé, de 3846 à 4158. Ensemble ils représentent 10.38% de la population, taux jamais atteint auparavant. Par ailleurs les personnes dont l’un des parents est d’origine étrangère, ou nées à l’étranger, représentaient 6.7% de la population.
Les Polonais sont de loin les plus nombreux : 11938 personnes, soit 37.7% des immigrés, viennent ensuite les Lituaniens (5.1%) et les Philippins (4.8%). Il y a aussi 217 Françaises et 243 Français.
Autre information intéressante : il y a eu 801 personnes naturalisées en 2015 et 595 en 2014.
Relations internationales
Le Brexit inquiète :
– 11.6% des exportations islandaises de biens et services,
– 15% des importations de service,
C’est ce qu’explique Lilja Dögg Alfreðsdóttir, Ministre des Affaires Etrangères et Vice-présidente du Parti du Progrès, le 15 octobre, dans un intéressant exposé à l’Université d’Islande (voir https://www.utanrikisraduneyti.is/m…). L’Ambassade d’Islande à Londres va être étoffée pour suivre de près les négociations de sortie.
Autre très intéressant exposé de Lilja Dögg, engagée en politique mais aussi brillante économiste ayant travaillé au FMI de 2010 à 2013, le 20 octobre à la London School of Economics : « Iceland’s Road to Recovery – Key Lessons » (voir https://www.utanrikisraduneyti.is/m…), où il s’agit en conclusion de défendre les moyens choisis pour lever le contrôle des changes.
Actualité culturelle
Après avoir fait le tour du monde l’exposition « Björk Digital » sera présentée à Harpa à l’occasion de Festival « Iceland Airwaves » (du 2 au 6 novembre) ; où des chansons du dernier album de Björk (Vulnicura) sont associées à des vidéos de réalité virtuelle (voir http://grapevine.is/culture/music/a…).
Pendant ce temps la vie continue…
05/10 : Gunnarhólmi, lieu où Gunnar á Hliðarendi (Njálsaga) s’arrêta et décida de faire demi-tour pour revenir chez lui et être tué dans un guet-apens n’est pas celui que l’on montre aux touristes !
07/10 : pour mettre fin à une longue dispute sur la gestion du site de Geysir, l’État achète les 2.3 hectares contenant Geysir, Strokkur, Blesi et Óþerrishola,
14/10 : jamais autant de touristes islandais ne sont partis à l’étranger, soit 55% de la population ; et 75% ont visité leur île,
20/10 : la presse du monde entier et 332000 Islandais soutiennent Arna Ýr Jónsdóttir dans sa décision de quitter le concours de beauté de Las Vegas parce que les organisateurs lui ont demandé de maigrir. Ils croient qu’elle est bien comme elle est, et elle aussi,
26/10 : les glaçons importés coûtent moins cher dans les magasins que ceux fabriqués en Islande.

Rencontre avec Birgitta Jónsdóttir à Paris

Rencontre animée par Martin Untersinger du journal Le Monde

Samedi 17 septembre de 15 à 16 h à l’auditorium du Monde

 80 Boulevard Auguste-Blanqui – 75013 Paris M° 6 Stations Corvisart ou Glacière

M° 5, 6 et 7 Station Place d’Italie Bus 21, arrêt Glacière Parking : Place d’Italie

 

Birgitta Jónsdóttir, la « poéticienne », est une femme politique et militante pour la liberté de la presse islandaise. Elle est membre de l’Alþing depuis avril 2009, représentant à l’origine le parti politique Mouvement des citoyens, un mouvement visant la réforme démocratique au-delà des partis politiques de gauche et de droite, puis le parti Le Mouvement et représentant actuellement le Parti pirate islandais qu’elle a fondé en 2012.

Elle est pressentie pour devenir la prochaine première ministre de l’Islande, et veut en finir avec la politique du court-terme.

 

Actualités islandaises – Juillet-Août 2016 (par Michel Sallé)

A quand les élections ? Telle a été la question de l’été, à laquelle la réponse n’a été apportée que très tardivement et du bout des lèvres par le gouvernement : ce sera le 29 octobre… Que les responsables des partis au pouvoir, notamment le Parti du Progrès, aient à ce point hésité à respecter un engagement pris lors des manifestations consécutives à la présence du Premier Ministre d’alors, Sigmundur Davíð Gunnlaugsson, sur les « Panama Papers », illustre leur désarroi. Mais cette hésitation s’explique : avec l’apparition et le succès de nouveaux partis et peut-être la disparition de l’un d’eux ces élections vont très probablement générer une recomposition sans précédent du paysage politique au détriment de leur parti.
Et tout ceci se passe pendant que l’île continue d’enregistrer des résultats économiques si positifs (4.5% de progression du PNB) que certains s’inquiètent d’une surchauffe comparable à celle de 2007. Les touristes n’en ont cure dont le nombre augmente de manière exponentielle ; d’autres ou les mêmes, s’en inquiètent aussi, mais l’actuel gouvernement, comme son prédécesseur de 2007, semble incapable de résister à une manne financière d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la fragilité.
Élections et recomposition du paysage politique
Même si plus de partis présentent des candidats aux élections, la vie politique islandaise a toujours reposé sur quatre partis : les deux anciens, généralement classés à droite (je reprends ici cette qualification, généralement utilisée par les commentateurs islandais, mais qui n’a qu’une signification très relative tant la personnalité des dirigeants est importante), Parti du Progrès (fondé en 1916 comme parti agrarien) et le Parti de l’Indépendance (fondé en 1929 et toujours en position dominante ), et deux partis de gauche dont la ligne de partage a fluctué au gré d’ambitions personnelles et, plus récemment, selon deux thèmes : l’adhésion à l’UE et l’écologie. Souvent est paru à l’Alþingi un cinquième parti mais sa présence n’a duré que le temps d’une législature et n’a pas empêché la constitution d’un gouvernement reposant sur l’alliance de deux partis, majoritaires à eux deux. C’est le cas en 2009 avec le Mouvement des Citoyens (4 élus dont Birgitta Jónsdóttir qui y paraîtra vite mal à l’aise), et peut-être en 2013 avec Avenir Radieux, dont le pronostic vital est engagé.
Mais voici que les Pirates, dont personne n’attendait en 2013 qu’ils franchissent la barre qualificative de 5%, obtiennent avec 5.1% des suffrages 3 sièges puis s’installent autour de 15% des intentions de vote par leur excellent travail à l’Alþingi, avant de bondir à près de 40% grâce au refus du gouvernement d’organiser un référendum sur la négociation d’adhésion à l’UE, puis de refluer au dessous de 25%.

Benedikt
Par ailleurs le publiciste Benedikt Jóhannesson (directeur de Iceland Review) a créé en avril 2014 « Redressement » (traduction approximative pour « Viðreisn » ; voir chronique d’avril 2014). Benedikt est un membre influent du Parti de l’Indépendance (et cousin germain de Bjarni Benediktsson, donc membre de la famille « Viðeyjarættin », considérée comme la plus puissante de l’île) ; son parti s’affiche au départ comme une dissidence pro UE du Parti de l’Indépendance puis est mis en sommeil en attendant la proximité d’élections.
Dernier facteur influent : l’Alliance Social-démocrate au pouvoir de 2009 à 2013 ne s’est pas relevée de sa déconfiture à l’élection de 2013 (de 29.8% des suffrages à 12.9% !) ; le changement récent de président (voir chronique de juin 2016) va-t-il la sauver de la disparition ? Son ancienne alliée Gauche-Verte est en meilleure position grâce à la notoriété de Katrín Jakobsdóttir, et pourrait profiter des difficultés de l’Alliance et peut-être même de celles des Pirates.
C’est donc un paysage nouveau qui est en cours de composition. Malgré l’instabilité de la situation, on peut distinguer quelques tendances significatives :
  • Selon toute vraisemblance les deux « vieux » partis vont subir un échec : Le Parti du Progrès paraît durablement affaibli. Usure du pouvoir, maladresses de son président avant même qu’il n’apparaisse sur les Panama Papers, maladresses depuis en voulant à tout prix se maintenir à la tête du parti… Sigurður Ingi Jóhannsson, nouveau Premier Ministre, a su de l’avis de tous, remettre le gouvernement au travail. Ira-t-il jusqu’à faire partir celui dont il était le meilleur soutien ? C’est évidemment la condition pour que son parti limite les pertes. Avant même la réapparition de « Redressement » le Parti de l’Indépendance ne parvenait pas à rester à son niveau de 2013. Il va se présenter affaibli au scrutin à venir.
  • Mais il est possible que l’on retrouve l’un d’eux dans la future coalition. Sauf grande surprise, toujours possible le tableau ci-dessous montre que celle-ci devra associer au moins trois partis. Le choix est théoriquement large puisque treize partis présentent des listes. Mais en fait, outre les deux partis cités plus haut, le choix se limite ( ?) aux « Pirates », à « Redressement » , à la Gauche Verte et à l’Alliance Social-démocrate. Il est peu probable que « Avenir Radieux » survive à ses crises alors qu’il a aujourd’hui 6 députés :
  1. les « Pirates » ont des postures peu solubles dans la vie politique islandaise ordinaire – c’est même leur raison d’être – ; Birgitta renoncera-t-elle à son idée de législature courte ? De plus, curieusement, Helgi Hrafn Gunnarsson, le véritable artisan de leur succès, ne se représentera pas pour, officiellement, se consacrer à la consolidation du mouvement !
  2. « Redressement » bénéficie de l’arrivée de personnalités transfuges du Parti de l’Indépendance, ou proches de ce dernier dans le passé, qui lui donnent une couleur pro-UE, et une autre très libérale peu compatible avec les projets des autres partis,
  3. L’Alliance Social-démocrate joue sa survie, et sera donc un négociateur opiniâtre,
  4. La Gauche Verte se montre prête à diriger une future alliance, mais avec qui ?
Les derniers sondages (Gallup) sont les suivants,
mais il faut insister plus que de coutume sur leur fébrilité (ainsi le 27 août, MMR n’attribue que 12.4% à la Gauche Verte mais 10.6% au Parti du Progrès). De plus les précédentes élections ont montré que les électeurs valorisent volontiers la nouveauté entre deux scrutins mais préfèrent les « valeurs sures » le moment venu.
Il y aura donc, discrets ou en pleine lumière, d’intenses marchandages. Les Pirates ont mis au cœur de leurs exigences la réforme constitutionnelle (voir chronique de juillet-août 2011) dans la suite des travaux de la Commission Constitutionnelle et l’organisation du référendum sur la poursuite des négociations d’adhésion à l’UE, sujets très importants pour l’avenir mais qui ne sont plus au cœur des préoccupations des électeurs. Ne risque-t-on pas à nouveau de les décevoir ?
La situation économique
Dans un communiqué du 24 août la Banque Centrale annonce sa décision de baisser son taux directeur de 5.75 à 5.25%. Elle l’explique par des prévisions encore meilleures que prévu (Moodys porte sa note de Baa2 à A3), notamment une progression du PNB de 4.9% pour 2016. Pourtant l’annonce surprend à un moment où l’augmentation du pouvoir d’achat (10% en un an) peut générer des effets inflationnistes. La banque constate que celles-ci sont très faibles grâce à l’excellente tenue de la couronne :
Cette dernière handicape nécessairement les exportateurs de biens, comme en témoignent les résultats du premier semestre 2016 :
La chute des exportations de produits industriels est essentiellement due à celle des cours de l’aluminium, alors que les produits de la pêche ont surtout diminué en volume. Aux importations, la baisse des cours du pétrole permet d’équilibrer une forte demande de biens d’investissement et de moyens de transport, conséquence du développement du tourisme. Comme pour les deux années, ce déficit sera largement compensé par l’excédent de la balance des services.

Bjarni
Mais en diminuant son taux de base la Banque Centrale veut aussi endiguer la spéculation sur la couronne qui a laissé de très mauvais souvenirs en 2008. Ainsi les opérateurs étrangers ont acheté en 2015 des bons d’Etat pour 50 milliards d’Ikr (400 millions d’€) ; c’est la crainte de cette rechute qui va conduire Bjarni Benediktsson, Ministre des Finances, à admettre dans une interview pour Bloomberg (voir http://www.bloomberg.com/news/artic…) que la monnaie islandaise ne pourra plus flotter aussi librement qu’avant la crise de 2008. Ce qui signifie que le démantèlement du contrôle des changes tant attendu et entamé depuis quelques mois ne pourra être total. Voici qui pourrait relancer les réflexions sur l’avenir de la couronne !
Actualité sociale
Désindexation des prêts immobiliers ?
Aux confins du social et de l’économique, mais en fait très politique, il y a le projet promu par Sigmundur Davíð Gunnlaugsson, ancien Premier Ministre, de supprimer l’indexation des prêts immobiliers. Il s’agit pour lui d’un projet emblématique au même titre que la « correction des dettes immobilières » (« skuldaniðurfelling » ; voir chronique de novembre 2013). Peut-être compte-t-il sur sa mise en œuvre pour redresser son image dans l’opinion ?
Jusqu’à la fin des années 80 du siècle dernier l’inflation faisait partie du quotidien des ménages islandais, dont l’indexation des prix et des salaires était à la fois cause et conséquence. Aujourd’hui encore l’indexation du capital restant à rembourser pour les prêts immobiliers est une pratique courante ; en période de stabilité des prix elle peut en certains cas donner l’impression décourageante que le capital à rembourser augmente malgré les remboursements. La désindexation voulue par Sigmundur Davíð suscite cependant des oppositions, et c’est une réforme très modeste qui en son absence va être soumise à l’Alþingi. Elle limite la durée des emprunts à 25 ans au lieu de 40 antérieurement, et surtout, par diverses exonérations fiscales, allège le financement du premier achat immobilier.
L’aménagement du territoire et migrations internes
S’il est un sujet essentiel pour l’avenir socio-économique de l’île c’est celui de son aménagement démographique, sujet que l’on ne rencontre guère dans les projets politiques !
Le très intéressant rapport « Stöðugreining Byggðastofnunar » (« Byggðastofnun » Institut de Développement Régional ; voir http://www.byggdastofnun.is/en/home) et très bien documenté (115 pages de tableaux et de préconisations) montre l’ampleur du problème, car les disparités portent aussi sur les âges, la répartition hommes/femmes (104 femmes pour 100 hommes à Reykjavík, 90 dans l’ « Austurland ») l’éducation…

mouvements de population entre 2006 et 2016 sur cette même période la population totale augmente de 11%
Diplomatie
Madame Berglind Àsgeirsdóttir dont nous avons tous apprécié l’ambassade en France nous a quittés pour Moscou ! Et aussi Nina Björk Jónsdóttir ! Elles sont respectivement remplacées par Kristján Andri Stefánsson et Jónas Haraldsson.
Culture
La Nuit de la Culture (voir http://culturenight.is/about) est cette nuit d’août (cette année le 20 août) où la Ville de Reykjavík fête son anniversaire : une centaine de milliers de personnes circulent à travers les rues pour visiter les ateliers d’artistes ou autres manifestations artistiques qui leur sont proposés. La veille a eu lieu le Marathon de Reykjavík.
A Grímsey, donc très loin de Reykjavík, un concours a été organisé pour l’œuvre symbolisant le mieux cette île, qui recèle la seule portion arctique de l’Islande. Fabriqué à Akureyri le globe de 8 tonnes a pu être transporté jusqu’à l’île, mais il est vite apparu qu’on ne pourrait lui faire parcourir les quelques hectomètres séparant le port du Cercle Polaire sans endommager gravement le passage ; le globe restera donc non loin du port. N’est ce pas ce que voulaient les auteurs de l’œuvre ; déplacer le Cercle Polaire ?
Et si des lecteurs de cette chronique souhaitent améliorer leur connaissance de l’islandais, je ne puis que conseiller la lecture de « Parlons islandais » (l’Harmattan) dont Solveig Bjarnason propose une deuxième édition.
Car pendant ce temps la vie continue…
15/07 – afin que cessent les fréquentes détériorations de ses conduites d’eau froide, Birgir, paysan à Ríp (Skagafjörður), a du passer un accord avec les elfes vivant sur ses terres,

prisonniers à l’entraînement
19/08 – parmi les milliers de concurrents au Marathon de Reykjavík Guðni, le nouveau Président (1h 24’ 32’’ au demi-marathon) et des pensionnaires de la prison Kvíabryggja (connue pour recevoir les « banquiers félons »),
27/08 – on a trouvé un rocket de bazooka à proximité de la N1, apparemment abandonné par l’armée britannique ; premier effet du tourisme ?
29/08 – la terre tremble sous le Mýrdalsjökull et autour de Katla,
31/08 –Voici l’enveloppe de la lettre qu’a reçue Rebecca, paysanne à Hólar… Heureusement que les postiers islandais lisent l’anglais !!!

 

Drones interdits au-dessus du parc du Vatnajökull

Jusqu’à présent l’Islande était plutôt libérale en matière de drones, mais depuis quelques temps ces derniers se font de plus en plus nombreux et survolent en permanence les sites touristiques.
Ces drones entrainent des risques pour les personnes présentes sur les sites en cas de chute, leur bruit perturbe les oiseaux présents sur le site et gêne la nidification.

Pour la tranquillité des oiseaux et celle de la plupart des touristes la décision a été prise de bannir les drones dans toute la région nord du parc national du Vatnajökull. Nul doute que cette interdiction entrera aussi bientôt en vigueur dans d’autres lieux touristiques de l’Islande.

http://icelandmag.visir.is/article/drones-banned-northern-vatnajokull-national-park-protect-wildlife

Fête de la musique 21 juin

Grande halle de la Villette de 15h à 19h30, 24 pianos décorés par des artistes de tous les pays participant à l’Euro 2016. L’artiste Nína Gautadóttir représente l’Islande, et s’est inspirée d’Eyjafjallajökull qui crache des ballons de foot.
Les pianos vont être distribués dans Paris pour le reste de la compétition.

Écran géant à Paris pour l’Euro 2016

Le restaurant/bar le « NJUTBAR » 22 rue de la banque 75002 Paris est a tendance scandinave c´est pour cela que le patron a décidé de retransmettre tous les matchs de l´équipe d´ Islande sur écran géant pour l’Euro qui commence bientôt.
N´hésitez pas a passer l´information a tous les Islandais de Paris.

Salutations scandinaves.

Bruno TRUEL

Le plus grand bateau Viking du monde fait escale dans le port de Reykjavík


Le 10 mai, s’est amarré au port vieux devant le Musée Maritime, un magnifique bateau Viking long de 35 mètres, fabriqué à partir de chêne massif avec une voile de soie rouge éblouissante. Nommé Draken Harald Hårfagre, le navire est une réplique d’un drakkar mythique Viking nommé dans les Sagas « le grand navire ».
L’arrivée de ce navire impressionnant en Islande marque la première étape d’un voyage épique, la traversée l’Atlantique Nord dans le but de « revivre » la découverte Viking du nouveau monde et de rendre hommage au légendaire voyage qui a eu lieu il y a plus de 1 000 ans lorsque le célèbre explorateur islandais Leifur Eriksson a découvert l’Amérique. Le navire a appareillé à Haugesund (Norvège) le 24 avril et devrait arriver à Terre-Neuve (Canada) en juin.
Le navire sera sur le vieux port de Reykjavik jusqu’à
vendredi 13 mai. Il continuera son voyage vers l’Amérique du Nord en s’arrêtant en chemin au Groenland.

http://www.reykjavik.com/worlds-biggest-viking-ship-in-reykjavik/

Photos : ©-Roman-Gerasymenko

Draken-Ship-10-©-Roman-Gerasymenko-2Draken-Ship-03-©-Roman-Gerasymenko