Interview d'Arnaldur Indriðason dans Télérama

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Interview d'Arnaldur Indriðason dans Télérama

Message par Myriaðe »

Arnaldur Indriðason et l?âme de l?Islande

L?invité de l?été (2/4) | Les mutations brutales de son pays ne le laissent pas de glace. Cet observateur de la société a créé un héros de polar porteur de l'âme islandaise. Arnaldur Indriðason est dans ?Télérama? du 17 juillet.


Son personnage, Erlendur Sveinsson, flic taciturne et mélancolique, sensible au malheur des autres mais incapable de s?occuper de sa propre famille, est connu du monde entier. En France comme ailleurs, on suit avec passion ses aventures qui se vendent partout à des centaines de milliers d?exemplaires. Son créateur, Arnaldur Indriðason, 52 ans, serait-il sans le vouloir devenu le meilleur ambassadeur d?Islande, petit pays de trois cent vingt mille habitants, de sa culture, de son histoire ?

Difficile en effet d?imaginer plus islandais que son héros, déraciné, bousculé par les mutations brutales que son pays a connues depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Exode rural massif (la moitié de la population habite aujourd?hui à Reykjavík, la capitale), folie financière (en dix ans, le poids des trois grandes banques du pays était devenu tel que leur capitalisation pesait dix fois le produit intérieur brut) et atterrissage en catastrophe, en 2008, avec la crise et la faillite de l?Etat.

Historien de formation, observateur aigu de la société, défenseur acharné de sa langue, Arnaldur Indriðason a choisi le polar pour cela : dire la réalité de l?Islande, jusqu?à refléter son âme.

Votre personnage, Erlendur, c?est l?Islande en miniature?
Quand je l?ai créé, je ne savais pas grand-chose de lui. Je l?ai découvert peu à peu, il s?est étoffé au fur et à mesure de la dizaine d?enquêtes où je le mets en scène. Mais je savais, dès le départ, que c?était un homme profondément ancré dans la réalité islandaise, dans ses paysages, dans son histoire. Tout ce qui lui arrive, les personnes qu?il rencontre, les situations auxquelles il est confronté, est absolument réaliste. Je voulais qu?il représente quelque chose de l?âme islandaise.

Pourtant, vous lui avez donné un prénom, Erlendur, qui signifie « étranger ». Parce qu?il est déraciné ?
On peut l?interpréter de diverses manières. Il est d?abord étranger à la tradition littéraire islandaise, où ce type de personnage n?existait pas jusqu?alors. D?une certaine façon, Erlendur est un hors-la-loi littéraire. Il est également un étranger dans la ville. Il est né dans une ferme, dans les fjords de l?Est, y a vécu toute sa jeunesse et n?est venu que plus tard habiter à Reykjavík, à l?instar de nombre de ses compatriotes. Et puis c?est un étranger dans l?époque où il vit.

Erlendur est un homme du passé, nostalgique de l?Islande traditionnelle, il est profondément mélancolique. L?Islande est passée, en quelques décades, d?une société de paysans et de pêcheurs pauvres à une société urbaine, citadine, parmi les plus riches de la planète. On sait bien que des changements économiques et sociaux aussi radicaux laissent toujours des gens sur le côté de la route. Erlendur fait partie des laissés-pour-compte de cette révolution.

Il vient des fjords de l?Est. Qu?est-ce que cela veut dire ?
Qu?il connaît intimement la difficulté de vivre en Islande. Le paysage est sauvage, fascinant, mais aussi redoutable et dangereux. Le temps peut changer en quelques instants ; la tempête, se lever brutalement. Depuis toujours, les Islandais ont su que quand un homme quittait une ferme pour se rendre dans une autre il n?était jamais sûr d?arriver à destination. Parfois, il arrivait totalement frigorifié et on le sauvait de justesse. Parfois, il mourait en chemin, dans la tempête. Parfois, il s?écartait de la route, se perdait dans le brouillard ou la neige, et son corps n?était jamais retrouvé.

Cela arrive encore aujourd?hui aux chasseurs d?oies ou de perdrix. Des centaines d?histoires de ce genre ont été consignées dans des livres ? un véritable genre littéraire ? qu?Erlendur collectionne car il est hanté par la disparition de son petit frère, dans une tempête, quand ils étaient enfants.


Retrouvez l'intégralité de cet entretien dans le numéro de Télérama du 17 juillet 2013.
Myriaðe (Mýgrútur)
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