Visiblement ce petit bout de pierres a son importance. Je pense qu?il assurait la continuité de la route avant que le progrès ne le démolisse et ne le remplace par un ouvrage plus important.
Je profite de cet arrêt-pont pour photographier des moutons.
Je vous rassure, Le Herr Frankenstein n?est pour rien dans la dernière photo, c?est juste un effet de perspective
Puis j?arrive à Glymur. Enfin, au parking qui est au pied du début de la balade permettant d?aller admirer la plus haute chute d?Islande. C?est, pour moi, un passage obligé, en grand amateur des chutes du pays.
Je prendrai donc mon courage à deux mains et je mettrai mes plus beaux habits de pluie pour affronter le pluvieux temps islandais. En même temps c?est tout à fait tenable. J?ai eu pire plus tard dans le séjour?
Bon, la balade est donnée pour 3h.
Tout le monde sait que les durées estimées sont définies par les mêmes vils personnages qui définissent le temps de préparation de toutes les recettes du monde. C?est donc systématiquement sous-estimé. En plus on est en Islande. Ils ont l?habitude des dénivelés. Je vous rappelle quand même que je viens d?un pays dont le point culminant est à 700 m (artificiellement, qui plus est, pour faciliter la vie des étudiants du pays

).
Mais j?y vais quand même.
Vu le temps et ma motivation profonde, je manque de faire demi-tour plusieurs fois. Je ne pourrai de toutes façons pas aller au bout si je ne veux pas finir la journée trop tard.
En plus j?ai croisé deux Allemands qui m?ont dit qu?ils n?étaient pas allés au bout de la balade, à cause du vent, trop important. Je comprendrai plus loin pourquoi cette remarque était importante.
Motivé je suis, donc
Mais les paysages sont jolis.
(vue vers le fjord dont je viens).
J?arriverai finalement à la rivière une bonne demi-heure après mon départ.
J?y croiserai également la famille de Polonais que j?avais déjà croisée ce matin dans la grotte de l?obscure noirceur impénétrable où qu?on voit rien.
Ils cherchent le chemin permettant de traverser la rivière.
En fait de chemin, il y a??.. un tronc d?arbre couché en travers. Oh, un tronc certes, mais attaché et muni d?une chaîne en acier servant de rampe.
C?est là que je rencontre un couple d?Anglais qui reviennent de la chute. Mais ils ne sont pas allés tout en haut, il y fait trop glissant et le vent est trop fort.
Ils me disent également que pour traverser la rivière il faut, pour bien faire, quelqu?un de l?autre côté pour tendre le câble. Celui-ci est en effet un peu lâche et s?y tenir n?a pas beaucoup d?effet si l?on tombe. Il s?éloigne en effet facilement du tronc de la hauteur d?un homme. Un coup à se retrouver parallèle à la rivière
Ils veulent bien m?aider à traverser mais pour revenir, faudra trouver qqn d?autre?
Mouah ah ah.
ça me les brise menu, mais je renonce. Pas le temps, pas envie de me casser la figure, pas acrobate (parce qu?après c?est une corde qui permet de grimper le long du chemin?) et puis il pleut.
Deuxième « difficulté » qui me fait renoncer après la route trop défoncée de la 35.
Fille de joie.
ça commence à bien faire ces histoires ! C?est pas ça, je reviendrai, mais bon, ça m?escagasse de ne pas poursuivre, ne sachant jamais vraiment si c?est de la pusillanimité ou une décision sage et réaliste.
Après tout, j?aurais toujours pu traverser à califourchon sur ce tronc, non ?
Je ne le saurai sans doute jamais.
Quand je reviendrai, l?endroit sera balisé avec des escaliers en béton, probablement.
Je reviendrai donc vers Titine.
(les photos sont assez moyennes, mais vu le temps, je ne sortais pas le reflex de son sac, c?est quand même ballot de construire des appareils photos qui ne sont même pas résistants à la flotte !! Le prochain sera waterproof).
Je croiserai un jeune couple (ben oui, jeune, faut que je me rende à l?évidence, je ne le suis plus, enfin, pas autant qu?avant quoi

) qui s?adressera à moi en islandais. La seule bonne nouvelle de la journée
Je croiserai aussi des tites plantes.
Avec tout ça il est pas loin de 19h quand je reprends la route.
Je passerai le long du lac de Thingvellir, et c?est vraiment beau.
Le coin semble fourmiller de belles résidences. Le Lasne local (Lasne étant une des communes les plus chères de Belgique, si vous allez à Lasne, c?est bien simple, votre chance de croiser une Ferrari, une Porsche ou un Range triplent instantanément).
(je dis triple parce que les communes autour c?est pas mal non plus, mais c?est plus prolétaire, on y croise même des vieux 4x4 qui vibrent du pot)
Le lac est très joli, donc. Je m?arrêterai de temps en temps pour faire l?une ou l?autre photo.
Je passerai par le camping de Ulfljotstadur, qui me semblait être, d?après mes repérages, un petit camping sympathique. Mais il y avait visiblement une sorte de rassemblement scout organisé. J?ai rien contre les adolescents qui chient dans les bois, mais là ça ne me disait trop rien.
Sur la route vers Selfoss, un peu plus loin, je me renseignerai sur la présence d?un camping censé être tout près. On m?indiquera le chemin, dans les broussailles.
J?atterrirai sur une pelouse sur laquelle trônent déjà 4 motorhomes, tous islandais.
Je me sens épié et quelque chose me fait sentir que je ne suis pas bienvenu ici. J?ai vraiment l?impression d?être en terrain privé.
Je filerai, donc.
J?essaierai aussi de trouver le camping de Hveragerði, mais je n?y parviens pas.
Je cherche, pourtant, et je ne vous pas ce qui m?échappe : je suis pourtant au bon croisement de routes, je devrai voir des panneaux indicateurs, ou, à tout le moins, apercevoir un début de commencement de structure campingeste.
Ce n?est qu?après moult recherches que je m?apercevrai que le camping est effectivement à Hveragerði, mais que je le cherche à proximité du « i » de Hveragerði sur la carte, alors que le point central de la ville est situé au niveau du « H ». Et que sur ma carte, un écart de 8 lettres, ça fait tout de suite quelques kilomètres
Grand aventurier, donc.
Finalement j?opterai pour Selfoss, un peu la mort dans l?âme. Selfoss c?est quand même une grosse ville (il y a un rond-point et des feux de signalisation). Et j?aime pas les campings en ville.
Mais bon, il est tard, les campings sont nombreux, certes, mais pas à ce point. Et mes deux précédentes tentatives n?ont pas été fructueuses, alors allons à Selfoss?
Je suivrai une indication de camping que je finirai par perdre? avant de passer devant l?entrée d?un camping. Je ne sais finalement donc pas si c?est le camping auquel je pensais mais c?en est un, il est 21h, j?en ai marre et donc zou, c?est ici que je dormirai.
Je paie les 1000 ISK à la réception dont la salle fait aussi banquet pour résidents.
Il y a du monde, mais la pelouse est grande. La partie centrale est cependant interdite, trop humide !
Pas étonnant, il flotte toujours !
Bon, je voulais prendre une douche, moi, aussi.
Heureusement, il y en a dans ce camping.
Tiens, vous ai-je déjà parlé de ma timidité ?
Enfin oui, je vous en ai parlé, je m?en souviens, j?ai donc du déjà vous rabâcher les oreilles avec ça de nombreuses fois.
Cela va de paire, et pas seulement de fesses comme le disait le Grand Pierre (disparu depuis déjà 25 ans et deux jours, même Hélène, sa femme, est décédée tout récemment), avec un certaine pudeur.
C?est pas ça, avec le temps je m?améliore, je suis maintenant capable d?ouvrir les yeux quand je me douche. Il faut dire qu?un jour j?ai confondu la brosse qui me servait à me frotter le dos avec le balais des chiottes, donc bon.
Il est de ces expériences qui vous marque l?esprit.
Une certaine pudeur, donc.
Une fois encore vous me rétorquerez : « mais, Bifidusse, d?accord, on le voit bien que cette journée ne t?a pas passionné, on se rend bien compte que la foultitude de digressions dont tu nous gratifiés cette fois-ci sont le fruit de cette indigence voyageuse, mais bon sang, que vient donc faire ici cette histoire personnelle dont le scatologisme n?a d?égal que le peu de véracité ? ».
J?y viens.
Bon, j?ai peut-être un peu exagéré ma pudeur.
Mais dans tous les cas, je reste assez peu à l?aise quand il s?agit d?exhiber mes muscles délicatement sculptés.
Je vais donc à la douche.
Pour hommes.
Foutredieu, c?est une douche commune !
Je savais les Islandais peu portés sur la dissimulation des joyaux de la couronne, mais je n?avais, jusqu?ici, rencontré que des douches privatives.
Ben pas ici. Douches communes.
Il y a des rideaux, mais pour le couloir et pas entre les « cabines » de douche, fusionnées.
Et y?a quelqu?un. Un autre homme.
Il m?a vu !
Argh, je ne peux plus reculer. En cas de retraite anticipée, peut-être sera-t-il vexé ? Peut-être appellera-t-il la brigade des pudiques anxieux pour faire un exemple ?
Je dois y aller.
Affronter son regard - certes sûrement envieux, mais là n?est pas la question

- sentir l?air lourd et humide s?immiscer entre les parts de moi-même plus habituées au molleton du caleçon qu?aux moites atmosphères nordiques.
(?)
En fait c?est pas si terrible que ça finalement.
Bon, d?accord, il était sur la fin de sa douche, nous ne nous sommes donc pas côtoyés très longtemps. Puis je me suis dépêché et personne d?autre n?est venu. Mais j?ai quand même dû me découvrir.
Je suis fier. Cette fois-ci je n?ai pas reculé.
Bon, après cette grande victoire sur moi-même, il est passé 22h.
Je dégusterai quelques-unes des tomates que j?ai achetées en bord de route (cagibi sans maton, avec petit coffre pour déposer ses sous? c?est limite gênant tellement c?est confiant, j?ai pas l?habitude, même en payant mon dû, j?ai presque l?impression de faire quelque chose de mal).
Je profiterai aussi du wifi du camping.
Et puis j?irai dormir du sommeil du juste, après cette journée morne et pluvieuse.
Car demain, j?ai comme qui dirait un peu de route à faire, pour changer
