L'Islande à vélo - fin d'été 2013

Vous revenez tout juste d'Islande, vous n'avez pas encore défait vos valises que vous voulez nous montrer vos photos et nous faire partager votre enthousiasme ... Faites-nous rêver ...

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Neres
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L'Islande à vélo - fin d'été 2013

Message par Neres » 11 janv. 2014, 17:59

Salut !
Comme ce texte était écrit et que les posts de ce forum nous avait bien servi et motivés pendant toute la préparation du voyage (un grand MERCI d'ailleurs !), j'ai décidé de venir le poster. Je me suis dit qu'ici, il y aurait sûrement des gens que ça intéresse ! :D

Ce texte regroupe essentiellement les notes écrites pendant notre voyage en Islande, entre fin aout et milieu septembre. Il est un peu littéraire et tortueux, parce que j'écrivais mes pensées de façon spontanée, je cherchais à rendre mes sentiments, sans me soucier de simplifier. J'y ai ajouté des images, pour illustrer le texte comme pour raconter ce que je n'ai pas écrit.

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Quelquefois, des fumerolles s'élèvent, ou bien la vapeur s'écarte et l'on surprend une avancée de glaces éternelles, au-delà des montagnes. Ce sont les contrées floues : tout peut y être contemplé sans que rien ne semble changer. On voit les mêmes âmes d'un endroit à l'autre ? ça ne peut pas être les mêmes personnes, mais ce sont les mêmes faces, sourires et esquives : car on ne fait que les croiser. Image L'espace est vide d'humains, toutefois ce n'est ni de la désolation ni de l'abandon. Au fil des routes, l'on comprend que les islandais ne font que cohabiter avec la nature : elle fait partie du pays, de leur identité. Déesse déchue, le souvenir du culte demeure. Ils ne peuvent ni la renier, ni s'en éprendre, elle est trop dangereuse ? sauvage par essence, capricieuse, mystique. C'est la mer de Monfreid, de Maldoror. La nature est crainte et aimée, elle impressionne, mais on s'en accommode, elle ne nous trouble pas : les tempêtes les plus éclatantes doivent avoir quelque chose de banal pour les Islandais.

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N'oublions pas que la plupart des habitants ont d'ores et déjà délaissé les collines et rivages, préférant se masser dans les rares villes, comme si la terre des ancêtres les avait soudain déglutis. Il n'est plus question de cohabitation, seulement de voisinage : on reste proche de la nature, mais au sec derrière une vitre.

Image Tout change très vite. L'islande est une terre de contrastes : un jour il pleut, et les plaines venteuses s'étendent à perte de vue. Quelques heures plus tard, te voilà entouré par des centaines de touristes au milieu de steppes rocheuses, le soleil brille, et tu es le seul trempé jusqu'aux os !

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Les vents s'engouffrent dans les vallées profondes, entre les failles volcanique, où foisonnent des plantes rases que cambrent le souffle marin. Sur les plateaux, les rafales augmentent, et des éclats de roches tournoient sous les nuages. La voix n'y a aucune portée, le son y est déchiqueté. Les gouttes de pluie se muent en épines et criblent nos visages. Trouvons une faille par laquelle descendre : nous voici à l'abri, au calme presque.
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Plus loin, plus profond dans la cave de lave, c'est le silence et le noir absolu - ni lueur ni écho, pas même d'odeur. Ici rien ne change, car rien ne s'y agite, pas même l'air frais. Nous sommes les seuls à nous y rendre, car seuls de pieux voyageurs viennent contempler ce que renferme ce caveau, dissimulé en plein chaos élémentaire.

Image Sur les parois, il semble que des liquides se soient figés en coulant. Si lisse, si délicat, sous l??il comme sous la paume ! Au sol, les pierres brillent, scintillent à la lumière des lampes frontales. Du plafond tombent en multitude des gouttes de cette même matière lisse dont on peine à croire qu'elle est une roche solide. Image

Certaines pierres sont graduées en couches aux couleurs variées : et alors ? Mais c'est bien simple : nous n'avons jamais rien vu de tel ! Nous nous tenons là, presque sans perceptions ? ne soyons pas comme les trois singes, et ouvrons les yeux ! Nous pourrons dire comme la nature est sublime (mais il est illusoire d'avoir besoin d'une telle merveille pour s'en persuader, n'est-ce pas?) Image

Descendons, plus profond dans la grotte. Là se trouve le dernier élément de ce monument de la nature à l'homme : une gerbe de stalagmite de glace qui, depuis toujours, fond puis se reforme à l'identique, année après année. Étincelante, vibrante ; on nous souffle son nom : la cité des Elfes.
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Les Islandais sont des occidentaux. Loin d'avoir échappé à l'urbanisation, ils se sont concentrés près de la capitale.

Image Mais même en ce lieu, les éléments sont omniprésents : qu'il bruine, qu'il vente, que le soleil rayonne, qu'il y ait sur la mer du brouillard ou des lames, sur les monts nuages ou oiseaux, qu'importe, les bâtisses ne sont jamais assez hautes pour que l'on ne puisse voir le vide d'hommes, à quelques kilomètres, et la vigueur qu'a la nature en ces terres.

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Les arcs-en-ciel prospéreront, et la rumeur du peuple caché trouve toujours écho.

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Image Le pays doit concilier deux ardeurs : conserver son héritage, son patrimoine, son identité, tout en étant compétitif, urbanisé, moderne.



"J'avais vu le lieu de l'enfer, le lieu où la terre est aussi inhospitalière que la vie, qu'elle abrite d'ailleurs peu." Pascal Quignard

Image Peut-on voir l'Islande et ne pas s'y abreuver ? Cette terre recèle tout ce qui peut engendrer la vie. Si elle est si vide d'être vivants, c'est parce que jadis, les humains l'ont dévastée : ce qui est décrit dans les textes anciens comme une sylve innombrable a été rongée en quelques siècles. Sans forêt, sans végétation, la vie animale s'est raréfiée. Désolée et non stérile, la terre est meuble, la géothermie y est aisée, l'hiver n'y est pas plus rude qu'ailleurs et les intempéries à peine plus redoutables. Oui, cette île est vide d'hommes : ils craignent sa vitalité, son ardeur, son isolement, l'homme ne connaît plus la nature, elle lui est étrangère, et il ne veut pas avoir à faire avec ce qu'il ne maîtrise pas.

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Voilà ce que je sais de l'Islande. J'ai pu entrevoir le pays : son climat, sa topographie, sa faune et sa flore, et ses quelques bâtiments épars. De sa population, je n'ai eu que de vagues rumeurs : elle existerait, quelque part, là où j'ai le moins été. Qui ça, les islandais ? Qui sont-ils, comment vivent-ils ? On raconte ? ou plutôt, ils racontent eux-mêmes ? qu'ils vivent comme un peuple peu nombreux sur des terres inhospitalières : en se regroupant, en se massant les uns près des autres. On a tendance à côtoyer les mêmes gens toute notre vie : si l'on est islandais, c'est en tout cas probable.

Image Un pays magnifique, oui, mais l'islandais est occidental, et l'occidental n'est pas un plouc : même loin de tout, il veut être relié à la ville, même sur une île, son esprit s'étend jusqu'aux continents, et la technologie le connecte aux autres et au monde.

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Pour les mêmes raisons, les Islandais voyagent. Abreuvés de pluie, inondés de rivières, encerclés par la mer, ils s'en vont dans des pays chauds, voir le soleil enfin ? un soleil brillant, brûlant, pas ce soleil fantomatique, livide et sans force, qui plane au-dessus d'eux aux heures froides d'été.

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Les Islandais s'esquivent mais ne partent pas. Leur pays est beau, leur langue maternelle et certaines de leurs habitudes ne se trouvent qu'ici. Et puis, c'est un pays en bonne santé, plein de ressources, une capitale dynamique et pleine de joie (il paraît qu'il y a quelques fêtards ;) ). La balance penche en la faveur de la terre mère, surtout lorsque l'on y a vécu paisiblement et lorsque son identité est aussi forte.
Nous allons à la rencontre d'initiatives eco-responsables, solidaires, fertiles et épanouissantes. Pour savoir en quoi ça consiste, c'est par ici !

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